Le projet en quelques mots
Culminant à 2877 m d’altitude, le Pic du Midi accueille touristes et scientifiques au sein d’un site exceptionnel. Les travaux d’extension d’environ 500 m² ont pour but d’accroitre les capacités d’hébergement des scientifiques qui viennent travailler sur le site et d’augmenter les surfaces dédiées aux recherches astronomiques et atmosphériques.
Les travaux, sous maîtrise d’ouvrage de l’Université Toulouse III - Paul Sabatier, concernent 2 bâtiments :
- « Dauzère - Soler » : la création de 3 étages supplémentaires enchâssés dans le bâtiment Dauzère et sur les vestiges des écuries à mulets, pour accueillir une salle de pilotage et d’acquisition destinée aux observations de toutes les coupoles du sommet, des salles de travail en groupe et une trentaine de couchages pour les scientifiques.
- L’extension en rez-de-chaussée du Télescope Bernard Lyot pour y transférer les opérations d’aluminure en prévision de l’installation du spectropolarimètre infrarouge SPIP.
La visite s’est focalisée sur le bâtiment « Dauzère - Soler » en partie construit en bois.
Notes de visite
- Démarrage du chantier
Le site existant comprend environ 10 000 m² de surface de plancher, avec une imbrication de bâtiments qui ont été construits au fur et à mesure de la construction de l’Observatoire, démarrée à dos de mulets dans les années 1870. Le site, historiquement peu cartographié, comprend une multitude de "niveaux 0" ce qui a rendu les études d’implantation des nouveaux bâtiments complexes.
Le démarrage du chantier, prévu en mai 2020, a été repoussé d’un an le temps de réunir des compléments de financement.
Pendant la première saison (été 2021) les travaux se sont limités au déroctage, à la pose de micropieux et à toute la partie infra. La nécessité de renforcer certaines parois rocheuses a entraîné du retard par rapport au planning initial et la structure n’a pu démarrer qu’à la deuxième saison, avec la majeure partie du temps consacrée au gros-oeuvre béton, la partie bois n’ayant nécessité qu’1,5 mois de travail.
L’entreprise de gros-oeuvre a dû s’adapter constamment aux réalités du terrain (fruit de la falaise par exemple) pour recevoir la partie bois, préfabriquée et prête dès fin juin. La pose de celle-ci n’a pu démarrer que fin août.
- Parti-pris architectural et système constructif
Le nouveau bâtiment Dauzère - Soler est implanté de manière à respecter absolument les cônes d’observation des coupoles actuelles et futures. Il prend place autour des anciennes écuries à mulets : par volonté de continuité historique, certaines parties des murs anciens restent visibles.
En résonance avec l’architecture existante, la partie basse en béton reçoit un parement de pierres et la partie haute en bois un revêtement alu blanc, de la couleur des coupoles.
Une extension du bâtiment sera possible sur la terrasse Dauzère.
Les architectes ont choisi de construire en bois plutôt qu’en métal pour le côté chaleureux que celui-ci apportera aux chambres (plafond et certains murs apparents) et par affinité avec ce matériau.
Les murs sont en CLT (panneaux massifs lamellés-croisés) et non en ossature bois pour des questions de contreventement, liées aux charges sismiques. Ils sont isolés en laine de verre pour des raisons de poids et de coût.
Les planchers sont en CLT avec des chapes sèches par-dessus.
Les chambres sont conçues pour pouvoir être facilement transformées en salles de travail : une cloison sur deux est démontable. Les cloisons sont doublées en panneaux 3 plis lorsque l’acoustique le nécessite.
Les poutres bois sont en lamellé-collé.
Tous les voiles bois recevront un traitement ignifuge pour satisfaire aux exigences de sécurité incendie. Les poutres en métal sont traitées par peinture intumescente (la couche noire qui est visible sur les photos est une couche de protection).
Pour ne pas perturber l’observation astronomique, le bâtiment ne doit pas émettre de rayonnement thermique : il est donc sur-isolé par l’extérieur.
- Organisation de chantier
Le chantier se déroule uniquement en période d’été, entre mai-juin et septembre-octobre, du fait des conditions climatiques particulièrement contraignantes à cette altitude (neige, glace, vents violents).
L’acheminement des matériaux se fait principalement par héliportage (en dehors de quelques approvisionnement pouvant être fait par téléphérique, mais ceci pénalise l’activité touristique donc a également un coût). L’activité touristique démarrant à 9h le matin, l’héliportage doit se faire entre 7h et 9h. Si la météo ne le rend pas possible, la journée de chantier est pour ainsi dire perdue.
Une autre contrainte est évidemment la charge maximale admissible, limitée à environ 700 kg par chargement : ainsi, certaines poutres métalliques PRS ont dû être coupées.
L’héliportage des éléments préfabriqués bois a nécessité l’intervention du Super Puma (qui peut lever des charges de plusieurs tonnes).
Du fait des terrasses occupées par les touristes et de la nécessité de laisser libre l’aire d’atterrissage hélicoptère, aucune zone de stockage n’est possible en dehors du périmètre du chantier : cela nécessite une coordination de chantier très minutieuse.
Ainsi, la préfabrication a été privilégiée : les façades sont arrivées finies (bardage compris) en dehors des zones de jonction entre éléments. Une grue était présente sur site pour la mise en oeuvre.
Les déchets sont gérés par entreprise sans compte prorata et les big bag évacués par hélicoptère.
Les conditions de travail sont difficiles en raison des aléas météo et de l’altitude (au-delà de 2000 m, la fatigue lors des efforts est plus importante et les maux de tête fréquents du fait du manque d’oxygène), ce qui en fait un chantier réellement hors norme.